Synthèse des travaux de la consultation du 10 mars

I. Etat des lieux

1. Population concernée :
a. Demandeurs d’asile
Principalement des jeunes hommes isolés et Famille,
L’application des accords de Dublin rend les démarches interminables anxiogènes et une issue souvent dramatique
Notamment : Afghanistan, Soudan, Tibet, Erythrée et d’autres nationalités plus clairsemées
b. MNA (Mineurs non accompagnés)
c. Travailleurs sans papier (Plutôt : Afrique, Asie)
d. Roms (Roumanie principalement)
Ces populations sont très présentes en Yvelines, pour certains depuis de nombreuses années comme les travailleurs sans papier et Roms et jusqu’à 2 ans pour les demandeurs d’asiles.

2. Structures d’hébergement & autres
a. CHU
b. 115 / Samu Social /
c. Hôtel privé
d. PRAHDA
e. CADA
f. Foyer pour jeunes travailleurs
g. Hébergement chez l’habitant (en place limitées)
h. Bidonville/Campement/Voiture
i. Squat
j. Rue
Les structures sont précaires, inadaptées et/ou insuffisantes.

3. Institutions
a. Institutions représentantes de l’Etat
I. Préfecture :
Elle applique la circulaire Valls. Les demandes de rencontre de la part des associations sont pour la plupart ignorées. La GIP, OFII et Préfecture se déplacent dans les centres. Elle n’assure aucun contrôle des Vademecum des CHUM et laisse libre cours aux gestionnaires des structures.
II. Députés :
Des rencontres sont sollicitées afin d’intervenir pour contrer les projets de lois contraire aux droits fondamentaux
III. Sous-préfectures
Position Variable ou neutre.
IV. Mairies :
Certaines Mairies sont clairement hostiles : Conflans, Rocquencourt, Versailles, Carrières-sous-Poissy, Magnanville, Mantes la ville, Montigny, Andrésy.
D’autres ne prennent pas position ou ont une position variable : Achères, Mézy, Poissy, Sartrouville, Triel-Sur-Seine.
La mairie de La Verrière est bienveillante, la seule connue à ce jour.
b. Accompagnement Social et médical :
I. La PASS
II. CCAS
III. TAS (demande d’aide financière)
IV. L’ASE
V. SAMU social /115
Cet accompagnement est nécessaire et vital mais très insuffisant.

4. Organisations
a. Associations Agréées
I. ADOMA (Gargenville, Achères, Conflans, Les Mureaux)
II. Croix Rouge (Triel, Versailles (CHU, CHUM))
III. Aurore (Mézy CHU)
IV. SOS-Solidarité (Sartrouville CHUM)
V. COALLIA (Porcheville, Limay, Sartrouville, Les Mureaux)
VI. Pierre Blanche (Conflans)
Les associations agréées ont une insuffisance matérielle et en personnel formé.

b. Les associations, collectifs …
De nombreuses associations, collectifs et bénévoles aident au quotidien afin de pallier aux insuffisances des institutions dont : LDH, Secours Catholique, Cimade, Resto du cœur, RESF, ATD Quart Monde, Emmaüs, Welcome et autres associations locales. Mais elles n’ont pas les moyens humains et matériels pour pallier à toutes ces insuffisances.
Elles ont aussi pour rôle de dénoncer les situations inacceptables.

II. Faits intolérables :
Voici 8 exemples concrets qui sont représentatifs de notre territoire et loin d’être exhaustifs.
1. Dublin
– Une majorité de demandeurs d’asile (80/110 à Mézy, Triel, PRAHDA Achères) est sous la procédure de Dublin. Impossibilité de faire une demande d’asile en France et est menacée d’être expulsée.
– Assignation à résidence : Ils doivent pointés au commissariat lié à leur adresse administrative (ex : aller à Evry, Créteil, Paris 19… alors que logé à Mézy)
– Un jeune Afghan en 2017 fut frappé en Bulgarie où il a dû déposer ses empreintes et devait y être renvoyé, seule l’intervention d’un avocat a empêché le transfert.
– 9 africains sur les 12 interrogés ont dû déposer de force leurs empreintes en Italie (3 ont reçus des coups) ce qui les lie à ce pays sans leurs consentement.

2. Mineurs Non Accompagnés.
– Le département des Yvelines étant en sous-quota dans le cadre de la péréquation Taubira, de nombreux MNA dont la MINORITÉ a été reconnue dans d’autres départements, sont confiés à l’ASE 78 (= conseil départemental). Les tests osseux pratiquement systématiquement demandés, les déclarent MAJEURS, et ils sont remis brutalement à la rue. Sur le département, en moyenne 2 par semaines que l’on connaît, et cela même pendant la semaine « alerte grand froid » de février.
– Des mineurs à Coignières et aux Mureaux sont à l’hôtel, sans éducateur sur place et avec un suivi socio-éducatif quasi nul, des bons de nourriture et quelques tickets (contingentés) de transports.

3. Travailleurs Clandestins et Exploitation
– A Mézy : 9 dublinés ont été déclarés en fuite. Pour survenir à leurs besoins élémentaires et au transport, ils travaillent de manière clandestine. Exploitation. Exemple 2 afghans déclarés en « fuite » ont travaillé 10 heures par jour pour 20 € dans un marché.
– Pour avoir une carte salariée, il faut au moins 3 ans de présence en France et 24 mois de salaire mais sans papier on ne peut pas travailler.

4. Hébergement insalubre
– L’hébergement de Gargenville a été fermé en 2017 à cause de locaux insalubres, amoncellement de déchets et présence de vermine dont rats.
– situation très difficile des étudiants étrangers sans ressources : l’un d’entre eux à qui on livrait un petit frigo dans une chambre nue nous a offert de l’eau en tendant une bouteille … car il n’avait pas de verre mais seulement une fourchette

5. Entrave à l’accès aux droits sociaux et médicaux
– Triel, Versailles : deux centres Croix Rouge redoutés des migrants. Il y a des bons centres mais aussi 50% des centres Croix Rouge en IDF avec incidents, grèves de la faim ou manifs de migrants… Interdiction d’entrer dans les centres CR pour des tiers
– Un jeune Guinéen arrivé d’Italie depuis 8 mois avec des problèmes dentaires n’a été pris en charge que maintenant par un dentiste qui lui annonce l’extraction de 6 dents en raison de caries profondes non soignées.
– A Mézy, Conflans, Achères, Triel : Il y a 2 ou 3 travailleurs sociaux pour une moyenne de 130 personnes. Et il n’y a pas de médecin ou d’infirmière dans ces centres

6. Dormir dans la rue
– A Conflans : 400 tibétains ont dormi dans les tentes pendant 8 mois jusqu’à la mi-décembre et depuis 2011, des demandeurs d’asiles continuent de dormir dehors.
– Cela fait suite à des expulsions, refus d’hébergement ou administratifs et manque de structure d’accueil. Mais aussi des décisions politiques.
– A Carrières sous Poissy : Expulsion de leur lieu de vie de familles roumaines vivant en bidonville avec mise à l’abri provisoire des familles 2 ou 3 semaines, puis remise à la rue sans aucune proposition d’hébergement de ces familles avec jeunes enfants, le sous-préfet nous indiquant que la seule solution pour eux est de refaire un bidonville ailleurs « à condition qu’il ne les voit pas » (sinon il les expulsera à nouveau!).

7. Violence, Rétention et Expulsion
– Au printemps 2017, un jeune Soudanais qui avait menti sur son âge lors de la prise d’empreintes en Italie pour pouvoir poursuivre son voyage vers la France a été mis en rétention pendant plus d’un mois au CRA de Plaisir. Et cela malgré l’évidence pour tout le monde qu’il était mineur. Il a même été déclaré en fuite alors qu’il était en rétention suite à son refus d’embarquer. Il n’a pas été expulsé grâce à une mobilisation locale.
– A Achères : Monsieur P. H. demandeur d’asile en procédure Dublin était convoqué au 8è bureau de la préfecture de Police de Paris en novembre 2017. Il a été emmené au centre de rétention en fin d’après-midi. Un avion était prévu dès le lendemain matin tôt pour l’Italie. Ces horaires permettaient qu’il n’ait pas la possibilité de voir les juristes du centre de rétention, ni bien sûr de passer devant le juge des libertés (qui l’aurait bien évidemment libéré suivant la jurisprudence en cours à cette période). P. H. a demandé à voir le médecin car il était en cours de soins et demandait à pouvoir être opéré en France, et donc à retarder ou annuler son départ. Le médecin l’a vu très rapidement vers 22 h sans avoir accès au dossier médical, et sans avoir le temps de l’examiner; dans ces conditions, il l’a jugé apte à partir. P. H. a refusé de monter dans l’avion. Il a été, de ce fait, déclaré « en fuite ».
– Faute d’interprète un jeune érythréen a été mis en garde à vue 48h, après avoir été agressé et faussement accusé par l’agresseur.
– A Mézy : 9 dublinés déclarés en fuite ont reçu en plein hiver une notification de d’expulsion sous 1 semaine du CHU de Mézy, sans ressources ni aide ou proposition de relogement

8. Procédures administratives
– refus de visas d’une totale inhumanité de la part de consulats de France à l’étranger (consulat de France au Cameroun dans les cas particuliers cités). Par exemple:
– un enfant français dont le père français venait de décéder: Refus de visa à la mère Camerounaise de cet enfant (qui voulait venir le voir en France) par le consulat de France, puis par la commission de recours contre les refus de visa. La mère a dû attendre plus d’un an pour venir rejoindre son fils: c’est le Tribunal Administratif qui a accordé le visa après recours au bout de près d’un an.
– Une enfant gravement malade dont la mère vit en France en situation régulière. Refus de visa par le consulat de France pour cette enfant. Actuellement recours auprès de la commission de recours contre les refus de visa.
– Février 2018 : Aujourd’hui devant la préfecture de Versailles 83 personnes étaient là à 8h du matin dont 2 ont dormi sur place depuis 22h par -5°C. Et tous ne seront pas reçus en raison d’un quota quotidien.
– Le transfert incessant des migrants. Ils sont baladés de centre en centre, sans explication, sans tenir compte des liens tissés (ex 5 transferts en 6 mois : Porte de la Chapelle, PADA France Terre d’Asile, CHU Morainvilliers CHU Mézy, CADA Villers-Cotterêt (ville Front national). C’est un véritable obstacle à l’insertion, une cassure du lien social. Une maltraitance. Une entrave à l’accès des droits
– En mai 2017 : 4 dublinés sont convoqués à la même heure pour les entretiens à la préfecture de Versailles. Le dernier passe 2h30 après la convocation car chaque entretien dure 45min et un seul bureau les reçoit.
– Un jeune Afghan arrêté à la PAF le 6 novembre 2017 à 17h, non menotté, conduit au CRA de Plaisir, le lendemain, il a refusé de monter dans l’avion.
Appel auprès du Juge des Libertés qui a confirmé son renvoi le 8 novembre.
Recours au tribunal le 10 novembre, le juge n’a pas confirmé le renvoi.
Le jeune Afghan s’est présenté à la Préfecture le 13 novembre. On lui a pris ses papiers. Depuis déclaré « en fuite ».
– Un Jeune Afghan arrivé en Décembre 2016 est encore en attente de la décision de l’OFPRA après un dossier déposé il y a 6 mois. Soit 18 mois de procédure non terminée.

III. « Poser les fondements d’une politique alternative »

1) Permettre l’accès inconditionnel au territoire européen pour les personnes en quête de protection et leur assurer les mêmes chances d’obtenir une protection partout en Europe. Réviser la procédure Dublin pour prendre en compte les souhaits des personnes demandeuses d’asile.
En attendant appliquer systématiquement la clause de subsidiarité et donner aux personnes migrantes une information claire, compréhensible et précise sur l’intégralité de la procédure et à chacune de ses étapes.

2) Mettre en place une réelle politique d’accueil des nouveaux arrivants qui soit conforme à la Déclaration Universelle des Droits de l’Homme en ce qui concerne l’hébergement, les moyens de subvenir à ses besoins, la santé, l’apprentissage du français et l’accompagnement. Les nouveaux arrivants doivent vivre dans des conditions décentes pour pouvoir préparer et présenter leur dossier et effectuer si besoin les recours en vigueur.

3) Inciter les collectivités territoriales à développer cette politique d’accueil par des mesures particulières telles que :
• la mise à disposition de structures d’hébergement ou le soutien aux initiatives privées ou associatives d’accueil solidaire
• le subventionnement de l’utilisation des transports publics pour les personnes sans revenus même étrangères.
• la mise en place de centres d’information et d’accueil locaux qui détaillent les ressources locales pour les migrants.

4) Favoriser l’accueil et l’intégration des personnes étrangères
• en stabilisant leur résidence en attendant l’issue des demandes.
• en autorisant la participation à la vie économique par le travail y compris dans le secteur de l’économie sociale et solidaire et l’accès à une formation ou à un apprentissage.
• en incitant à participer à la vie sociale par exemple en créant un « pass » culture et sports
• en développant à un niveau convenable les cours de Français et d’alphabétisation

5) Favoriser la signature d’accords entre pays prévoyant la suppression de visas. En attendant ces accords rendre l’attribution des visas transparente en motivant par écrit les refus avec possibilité systématique de recours

6) Permettre dans tous les cas et avec un délai suffisant (un mois) aux personnes étrangères présentes sur le territoire de déposer un recours suspensif auprès des tribunaux contre une décision administrative qui les concerne.

7) Créer un Conseil représentatif des personnes migrantes présentes sur le territoire qui permette à ceux qui sont directement concernés par les politiques migratoires de s’exprimer et d’être représentés.

8) Introduire le droit de vote des étrangers non communautaires aux élections locales

9) En attendant des avancées législatives prendre des mesures exceptionnelles telles que :
• Mettre les moyens permettant à l’Etat et aux collectivités territoriales d’assurer l’intégralité de leurs responsabilités concernant la protection et l’éducation des mineurs étrangers non accompagnés
• Interdire l’enfermement des enfants en Centre de Rétention Administrative
• Délivrer un titre de séjour avec le droit de poursuivre ses études et de travailler aux mineurs étrangers scolarisés arrivant à majorité
• Remettre un récépissé avec droit au travail lors du dépôt d’un dossier dont le contenu est conforme aux critères de régularisation demandés.
• Assurer la gratuité pour la délivrance d’un titre de séjour.
• Assurer un accès aux structures de santé rapide et sans hiatus
• Imposer la compétence obligatoire des CCAS pour la domiciliation des personnes étrangères sur le territoire.
• Simplifier les formalités pour la délivrance de titres de voyages aux personnes disposant d’un titre de séjour, ainsi que pour l’installation et le travail des personnes ayant obtenu un titre de séjour dans un autre pays européen
• En ce qui concerne les familles pauvres étrangères vivant en squats ou bidonvilles, interdire les expulsions sans solutions de relogement ou d’hébergement stables avec accompagnement social et prise en charge par l’Etat si les collectivités locales n’offrent pas de telles solutions.

10) Uniformiser les procédures pour les étrangers sur le territoire et développer la formation des intervenants auprès des personnes migrantes

IV. « Construction d’un autre discours »

1) Mettre en avant les apports des migrants sur le plan culturel et économique et valoriser les réussites individuelles et les expériences positives

2) Favoriser l’expression des migrants
• En développant l’apprentissage du français
• En travaillant à donner une visibilité locale aux témoignages, projets, expressions culturelles des migrants
• En mobilisant les étrangers installés et intégrés

3) Favoriser la communication entre les migrants et la population
• Par des événements, rencontres, ateliers, expositions
• Par des publications et des interventions
• Par l’insertion des migrants dans les associations en tout genre

4) Susciter l’intervention des associations
• dans les établissements scolaires. Ce peut être par le biais des CESC, des Clubs UNESCO, des enseignants, des parents d’élèves, etc
• dans les Universités
• dans les CE d’entreprises
• dans les lieux culturels

5) Afficher publiquement un soutien à l’accueil des migrants
• Affichage, banderoles, badges, autocollants
• Solliciter les acteurs politiques locaux pour qu’ils prennent une position favorable
• Créer et entretenir des relations durables avec les médias locaux

6) Mutualiser sur une base locale les informations et les moyens d’agir, en particulier
• En réunissant les arguments permettant de démonter les préjugés
• En collectant les expériences positives et les témoignages de réussite

7) Intervenir de façon massive et concertée sur les réseaux sociaux pour répliquer aux positions anti-migratoires